Décidément il détestait les réveils, préférant se réveiller normalement. Pourtant quand le leur sonna si fort qu’il lui vrilla les tympans, il dû bien secouer Ren qui se rendormait déjà de peur de rater leur avion pour l’Italie. Et en tant que professeur accompagnateur, il ne pouvait pas le louper ! Contrairement à Ren, même si lui aussi était un peu déçu de la façon dont ils partiraient en voyage, il ne s’inquiétait pas pour ça. Parce que ses jeunes avaient minimum 18 ans et qu’il trouverait forcément du temps pour s’occuper de lui comme il se doit !

Il finalisa leur sac pendant que le médium se lavait et y alla à son tour, prêt pour le voyage en sortant de la douche. Bien sûr son petit-ami l’attendait excité devant la porte, comme un enfant et il lui prit la main pour quitter pour près de 15 jours son appartement. A vrai dire il voulait depuis quelques jours qu’ils emménagent ensemble et prennent un nouvel appartement mais il n’osait pas lui en parler, de peur que ce soit soudainement trop brusque pour lui. Même lui trouvait ça précipité mais c’était une envie vraiment forte et sérieuse qu’il avait. Bon il attendrait après l’Italie !

Pendant que Ren enregistrait ses bagages à l’aéroport il commença à rassembler ses élèves. Bien sûr, en voyant le jeune magicien qui revenait tout sourire vers lui, il eut droit aux remarques.

- Tsukushi, on ne savait pas que vous emmèneriez votre amant avec vous !
- Eh ! Ne l’appelle pas comme ça. Y’a des manières plus classes de le dire.
- Votre promise, fit le garçon en faisant une petite révérence.

Yûto le frappa gentiment avec le dos de sa main et ils rigolèrent tous. La quinzaine de jeunes avaient facilement acceptés Ren, de toute façon ils étaient tous les deux assez jeunes pour se mêler à leur groupe s’ils le désiraient. Les petites blagues salaces caractérisant cet âge allaient bon train, faisant plus rougir l’ange que le médium, ce qui étonna franchement les élèves. Finalement ils embarquèrent enfin et se frayèrent un chemin parmi le monde.

- On se met la ? Je veux le hublot, dit le jeune homme surexcité.
- Eh ! C’est pas jus…
- Tsukushi ! On a un malade par là !
- C’est encore Kim Jun ?
- Ouai.
- Rha c’est pas vrai celui là, il est malade même en trottinette. Je reviens, fit-il à son petit-ami en s’excusant par un baiser rapide.

Il lui fallut bien 10 minutes pour persuader le jeune homme que vomir en plein avion bondé comme celui-ci n’était pas une chose très recommandée et ils s’en étaient sortis indemnes avec des sachets de médicaments de la part des hôtesses. Quand enfin l’ange put souffler, il retourna à sa place et subit une grande déception en voyant que Ren dormait déjà. Et encore. Alors finalement il sortit un livre de son sac à dos, en lu la moitié, évita une bagarre et un crêpage de chignon et finalement s’endormit à son tour.

Sa tête reposait sur l’épaule du médium qui parlait avec quelqu’un, il ne savait pas qui mais ça faisait trop de bruit et il voulait se reposer encore un peu. Alors il grogna et passa un bras autour de son compagnon, provoquant des rires qui le forcèrent à ouvrir les yeux. Un de ses élèves était là et parlait gaiement de…magie ! avec Ren.

- Tsukushi ! Vous avez vraiment une drôle de façon de dormir !

L’ange haussa les épaules et se blottit à nouveau contre son magicien en chassant l’élève d’une main. Celui-ci finit par partir toujours en rigolant et après s’être fait disputer à cause de sa conduite il consentit à se redresser sur son siège.

- Je ne savais pas qu’il était si intéressé par la magie. Peut-être pourra-t-il vous accompagner toi et ton maître aux spectacles pour voir ? A moins qu’il ne te fasse du gringue !

Bien sûr il plaisantait. Et ils rirent ensemble en se souvenant de l’épisode Maria. On leur apporta leurs plateaux repas qu’ils dévorèrent même si la nourriture laissait à désirer selon lui. Remarque, il mangeait tellement bien et luxueusement avec le médium que tout le reste lui paraissait fade ! Ensuite, ils purent avoir leur moment du vol à eux, sans interruption d’élève ni d’hôtesse ni de qui que ce soit. Un vrai bonheur dont il profita pleinement en se lovant amoureusement contre son compagnon comme il le faisait lui-même et ils se murmurèrent des mots doux jusqu’à regarder le film qui passait en silence, son pouce caressant le dos de sa main délicatement. Ils s’endormirent encore, cette fois l’un contre l’autre.

Une hôtesse les réveilla, leur demandant d’attacher leurs ceintures parce qu’ils allaient atterrir. Tout compte fait les 16 heures de vol étaient passées assez rapidement et bientôt ils purent tous descendre de l’avion sans problème et surtout au complet, Ezeckiel avec la peur de perdre un de ses précieux élèves. Déjà qu’ils étaient une très grosse responsabilité ! Mais tout se passa bien, ils prirent un bus pour aller en ville. Il était près de 15h et déjà ils voulaient visiter Rome. Alors malgré sa fatigue et parce que c’était le premier jour, il leur laissa 2 h de temps libre sans sortir du centre-ville et en groupe.

Et puis Yûto avait trouvé là l’occasion d’enfin passer un moment en Italie avec son amoureux et, en lui prenant doucement la main, il lui murmura à l’oreille.

- Mon amour on a 2h devant nous. Tu veux faire quoi ?

Ils étaient sur une grande place commerciale, pas loin du Panthéon à vrai dire et ça faisait un moment qu’il n’y était pas allé. En même temps l’ange adorait l’Italie alors le médium pouvait choisir toutes les destinations qu’il voulait, ça lui irait. Il avait déjà hâte de profiter de ces deux petites heures avant d’aller à l’hôtel et de surveiller ces jeunes !

C’est vrai que l’admiration que portait Ren à ce magicien le rendait affreusement jaloux, il ne supportait pas qu’il en regarde d’autre ainsi à part lui. Il essayait bien de se calmer mais ça ne s’avérait pas facile quelques fois, surtout quand d’autres personnes confirmaient les dires du médium en disant qu’il était fantastique. Ok peut-être qu’il était un très bon magicien mais pas la peine de parler de lui comme si c’était un dieu vivant ! Enfin bref.

Finalement ils l’eurent leur moment à deux dans l’avion, film ou pas. Yûto s’amusait gentiment et innocemment à faire des baisers dans son cou, à caresser sa nuque et se blottir contre lui autant que le permettaient les sièges inconfortables. Le film passa ainsi rapidement, l’ange les yeux plus braqués sur la peau caramel de son amant plutôt que sur l’écran. Et pendant un instant, pendant une scène suggestive du film, il pensa que depuis l’épisode de Maria ils ne s’étaient pas adonnés à ce plaisir personnel, et lui en fit part. Le médium rougit magnifiquement et ils finirent par s’endormir.

Le réveil lui plu particulièrement, il sourit niaisement et alla vérifier que tous ces élèves étaient attachés avant de le faire à son tour. La descente fut rapide et sans anicroches. Ils purent bientôt tous sortirent et il fut soulagé lorsque leur groupe au complet embarqua dans le petit bus loué pour la journée. Enfin l’après-midi dans leur cas.
Ezeckiel avait bien sûr déjà visité Rome, ses pavés et ses monuments magnifiques. Il aimait particulièrement le Colisée et le Panthéon, avait longtemps discuté avec ces peintres et des sculpteurs de la région, de grands artistes selon lui. Il laissa champ libre aux jeunes pendant deux heures et demanda à Ren ce qu’il souhaitait faire.

- Hummm... J'aimerais aller au Panthéon et voir les ruines anciennes !
- Vrai ? Moi aussi !

L’ange avait un énorme sourire et un petit éclat dans les yeux. Il dévora amoureusement son compagnon pendant quelques secondes, se disant qu’il avait de la chance de l’avoir.

- Je vois que j'ai bien deviné ! On y va ?

Il le gratifia d’un de ses charmants sourires et ils se dirigèrent main dans la main jusqu’au Panthéon, facilement vu que Yûto connaissait les rues de Rome par cœur tellement il les avait parcourues autrefois. Une fois devant l’immense structure il s’apprêta à entrer lorsque Ren le retint.

- Attends ! Il décocha un sourire charmeur a son compagnon, il nous faut une photo souvenir.
- Eh ? Une photo ?

Il faillit dire « mais pourquoi faire ? » lorsqu’il se souvint que les humains qui vivaient peu de temps aimaient immortaliser certains moments de leur vie afin de se créer des « souvenirs ». Lui n’avait pas cette pensée vu qu’il pensait pouvoir toujours revenir et avait une mémoire incroyable. Mais il se laissa faire, ne sachant pas vraiment quelle position prendre et finalement sourit juste pendant que Ren lui faisait un bisou sur la joue. C’était marrant.

Enfin ils entrèrent et Ezeckiel ressentit cette nostalgie de quand il était ange accompli et qu’il visitait parfois les murs du Panthéon, accompagné de rares amis qu’il se faisait de temps à autre. En fait depuis quelques temps il ne venait à Rome que pour saluer un vieil ami avec qui il discutait auparavant et qu’il appréciait particulièrement. D’ailleurs le médium, émerveillé, frôla sa tombe du bout de ses doigts fins et se tourna vers lui, l’air curieux.

- Raphaël ? Qui est ce ?

Yûto sourit doucement comme on le ferait quand on nous demanderait qui était la veille personne sur vos photos de famille, comme quand on parle d’une grand-mère décédée, ou d’un grand-père. Lui avait toujours considéré Raphaël comme son grand-frère.

- Tu ne le connais pas ? C’est un peintre, un grand peintre. Ou plutôt c’était. Architecte aussi mais il me disait souvent qu’il préférait la peinture. C’était un ami à moi, je l’ai rencontré à Florence quand il avait 21 ans. C’est moi qui l’ai guidé dans la ville. Bizarrement il a perçu quelque chose d’étrange chez moi et nous sommes vite devenus comme des frères. Il était sage, instruit et très talentueux. Un vrai artiste comme on en trouve plus.

L’ange baissa les yeux sur la tombe avec un petit sourire triste.

- Il est mort à 37 ans, si jeune à cause de la maladie et de son état de santé fragile. Un peu…comme toi. Je ne dirais pas que c’est moi qui l’ai poussé à le faire mais je lui avais suggéré de se faire enterrer ici, parce que comme moi il adorait cette architecture. Cet endroit. J’ai été content et présent quand ils l’ont enterré ici. Cet homme le valait largement.
Il a consacré sa vie à son travail. On lui doit la Basilic de Saint-Pierre, tu le savais ? Vraiment incroyable, c’était comme mon frère. Il me manque quand je viens ici, tellement de choses ont changé...

Il caressa une dernière fois la tombe en pierre finement sculptée et se retourna vers Ren avec un faible sourire.

- Mais tout ça c’est du passé. On ne peut rien changer n’est-ce pas ?

L’ange embrassa doucement le médium et le prit par les épaules pour qu’ils fassent le tour de la structure. Pourtant il se retourna une derrière fois vers la tombe de son ami, qui un jour lui avait dit que lui aussi trouverait la passion en lui, qu’un jour il serait au maximum de son être pour quelqu’un d’autre comme lui l’était envers la peinture et son amante, la Fornarina. Comment savoir qu’il aurait raison ?

Avant de partir il se recueillit une dernière fois sur sa tombe et sortit. Il faisait toujours aussi beau et chaud dehors et Yûto lui proposa d’aller voir la Fontaine de Trévi. Bien sûr il ne croyait pas à ce truc de la pièce qui réaliserait votre vœu le plus cher. Pourtant là il fit une exception. En fouillant dans sa poche il trouva une pièce de la monnaie d’Italie et la donna au jeune homme.

- Vas-y, fais un vœu. Et surtout choisis bien parce que tu n’en auras qu’un !

Ren insista pour qu’il le fasse aussi et après avoir soupiré il prit une autre pièce, se mit dos à la fontaine et ferma les yeux. Et puis, très fort, il souhaita ceci :

Faites que Ren vive longtemps dans le bonheur.

Parce que c’était tout ce qu’il souhaitait réellement. Après avoir jeté la pièce derrière lui, il se retourna vers son compagnon et sourit.

- Alors ?

C’est dur à s’imaginer, 3025 ans sans amis. Pourtant Yûto pouvait compter les siens sur les dix doigts de sa main. Raphael était un de ceux qu’il regrettait le plus leur absence. Difficile à croire, mais c’était le peintre qui lui donnait des conseils sur la vie, lui un ange. Ezeckiel l’avait toujours écouté attentivement et le jour de sa mort, avait pleuré. Et à chaque fois qu’il revenait en Italie son absence se faisait sentir. Il se souviendrait toujours de cet homme passionné qui faisait passer son travail avant sa santé. Un peu comme Ren, ne put-il s’empêcher de dire.

- Non, je ne savais pas....Mais au moins, personne n'a oublié son travail....C'est un peu comme si il vivait éternellement ? J'aimerais bien avoir la même chance quand ce sera mon tour...

L’ange lui serra la main.

- Tu vas briller sur scène. Et moi je serais toujours là pour qu’on te garde en mémoire.

Ils finirent par s’en aller, Yûto toujours avec le même sentiment qui lui prenait la gorge lorsqu’il venait sur la tombe de son défunt ami. Un goût amer de mort dans la bouche. Mais à quoi bon penser à tout ça maintenant ? Il conduisit son petit-ami vers leur prochaine destination, la Fontaine de Trévi. Toujours magnifique sous le soleil tapant de méditerranée. Là, comme toutes les personnes présentes, il prit une pièce dans sa main et la tendit au médium en lui disant de faire un vœu. Apparemment ce dernier ne connaissait pas cette tradition et ses yeux s’illuminèrent. Yûto n’y croyait pas à ces trucs, sinon tous les problèmes seraient réglés non ? Pourtant Raphael lui disait que c’était un des seuls moyens pour les humains de garder un peu d’espoir pour leur avenir misérable. D’espérer quelque chose de meilleur. Maintenant il comprenait ces mots, parce que si une pièce avait pu guérir Ren, alors il ferait tout pour que ça marche.

Il fit le vœu que le magicien vive aussi longtemps que possible et se retourna vers lui pour savoir ce qu’il avait souhaité.

- Je ne vais pas te dire mon souhait ! Sinon il ne se réalisera pas ! On va aux ruines ?
- Mou~, fit-il avec une petite bouille de hamster. D’accord !

Les ruines, sur le sommet d’une colline verte, surplombaient la ville et resplendissait le soir dans el coucher de soleil. L’ange se promit de l’emmener à ce moment-là et pas en plein jour comme maintenant. Les pierres étaient plus grandes qu’eux, les dominant de haut et représentant la majesté des dieux.

- Du coup, les dieux qu'ils vénéraient les humains, ils n'existent pas ?

Yûto rit un peu devant l’innocence de Ren, mais pas longtemps vu que celui-ci, on ne sait comment, réussi à s’emmêler les pieds et à chuter. Aussitôt Ezeckiel le rattrapa d’un bras qu’il passa autour de sa taille et le tira vers lui. Sous le choc, son torse se retrouve collé au sien, leurs visages si près qu’il en rougit. Il avait l’impression que c’était hier qu’il s’était donné à Ren.

- Vous devriez avoir honte de me distraire, monsieur le professeur.
- Et vous devriez avoir honte d’user de tels stratagèmes pour vous rapprocher de votre professeur, cher élève.

Il fit semblant de se rapprocher de lui pour l’embrasser mais, au dernier moment, s’écarta et le lâcha, un sourire satisfait sur les lèvres quand il entendit son grognement de frustration.

- Les Dieux grecs ou Romains n’existent pas. Il n’y a pas de Jésus non plus, pas d’Allah…tout ça ce sont des foutaises inventées par les humains pour se défaire de leurs actes. Peut-être que certains humains ont vu une fois un ange, ou un démon, et lui ont donné le nom d’Athéna, d’Apollon…Pourtant aussi longtemps que j’ai vécu je n’ai jamais rencontré ces personnes ! Il n’y a qu’un seul Dieu, et il n’est pas là de partager ses pouvoirs avec ses fils !

Il rit faussement et leva les yeux vers le ciel.

- Tu dois ne pas vraiment y croire n’est-ce pas ? Que des personnes vivent au-dessus de ces nuages. Vu d’ici c’est un peu improbable.

L’ange déchu resta un moment silencieux comme ça, puis soupira et attira son compagnon contre lui. Amusé en pensant aux quelques minutes d’avant, il lui fit un croche-pied tout en le soutenant et le coucha lentement par terre, en-dessous de lui. Il sentit son cœur comme le sien s’affoler et Yûto l’embrassa lentement et doucement, sans chercher à aller plus loin mais plus pour retrouver la sensation d’un vrai baiser amoureux sans qu’il y ait de peur d’être vu par quelqu’un. Les fines mains de Ren sur sa taille le firent un peu frissonner et il approfondit le baiser en même temps qu’il le fit durer plus longtemps. Jamais repu des petites lèvres de son compagnon, il les lécha et les mordilla un long moment, satisfait de l’entendre retenir ses petits gémissements de début de jeu. Pour les seuls fois où ils l’avaient fait, Ezeckiel avait pu retenir tout ce qui plaisait à son amoureux et savait exactement à quel moment il était prêt, quand il n’en pouvait plus et lors de l’acte, l’instant précis à lequel il allait se libérer.

L’ange descendit un peu dans son cou, n’alla pas plus loin et finit par mordiller gentiment son oreille, cachant mal son désir naissant. Toutefois il ne souhaitait pas faire ça en plein air, enfin surtout ici.
Alors il se releva, l’entraînant avec lui et ils descendirent la colline en courant et se retrouvèrent rapidement dans le centre de Rome. Ses élèves l’attendaient déjà. Il compta tout le monde et ils allèrent à l’hôtel que le lycée avait réservé pour eux. Pas trop luxueux mais pas miteux non plus, il y avait des chambres de 2 et de 4. Ce fut clair, les élèves étaient dans les chambres de 4 répartis dans les étages et eux dans une chambre de 2, de sorte à se retrouver au milieu de tout le monde.

Le repas du soir ne fut pas exceptionnel. Il y avait une bonne ambiance entre tous les jeunes, ils adoraient déjà tous Ren. Et, vers 22h, il poussa tout le monde à rejoindre leurs chambres, plus parce qu’il était fatigué et qu’il voulait se retrouver seul avec son amant.
Mais ça ne se passa pas comme prévu. Yûto s’endormit sur le lit bien avant que le médium ne soit là, la porte encore ouverte. Et là, comme s’il n’attendait que cet instant depuis des jours, le cauchemar survint.

Comme d’habitude, des cris stridents, des pleurs qui ameutèrent la quasi-totalité de ses élèves. Impuissants et se prenant des coups s’ils essayaient de s’approcher, ils firent appel à Ren qui se trouvait encore à discuter dans le restaurant en bas. La douleur dans l’ange déchu se fit si intense qu’il ne sentit pas le phénomène se produire. Dans son dos, deux petites bosses commençaient à apparaitre. Ses ailes allaient sortir, sans que personne ne puisse y faire grand-chose. Enfin si, une personne pouvait éviter le scandale qui allait bouleverser la vie de ces jeunes gens, qui ne croyaient pas aux anges.

Yûto repoussa un cri effrayant qui fit vibrer le verre sur sa table de chevet. Et Ren entra dans la chambre en bousculant l’assemblée d’élèves regroupés autour du lit de leur professeur.

L’avion et la journée en générale l’avaient épuisé. Les autres aussi il le savait, quoi que ses élèves débordaient encore d’énergie, et ce à 20h ! Pendant tout le repas il tenta de refreiner ces pulsions, stopper les chahutements et finalement abandonna l’idée même de leur dire quoi que ce soit. De toute façon ils étaient seuls dans la petite salle de restaurant et le cuisinier les regardait avec amusement, signe que lui non plus ça ne le gênait pas.

Bizarrement le repas était un mélange d’Italie et de Corée du Sud, fait exprès sûrement et ça fit plaisir à tous les élèves, même Ren mais Yûto…disons qu’il s’en foutait un peu. Il mangeait de tout et qu’on lui fasse de la nourriture asiatique ou européenne, de toute façon ça finirait au même endroit ! Il ne dévora pas son assiette mais ne laissa rien dedans, bizarrement il avait un pressentiment. Comme une boule dans le ventre. Pourtant il n’en laissa rien paraitre et quand le dîner fut fini, il se leva de table, attendant que Ren le suive.

- Bon quartier libre pour tous mais on RESTE dans l’hôtel. Je ne veux pas vous courir après toute la nuit moi, j’ai une vie.
- Ohhhh oui on le sait ça ! Bonne nuit Manobu et Tsukushiiiiiii !

Encore des sous-entendus, mais au moins ils ne les rejetaient pas ! Ils partirent tous en courant dans les étages et déjà il les entendait tous changer de chambre. En levant les yeux au ciel, il se retourna pour voir où était le médium. Ce dernier était pris dans une discussion avec le cuisinier qui ne semblait pas vouloir le lâcher, alors il lui fit signe qu’il montait l’attendre en haut. Pourquoi avait-il fallu qu’ils soient dans un hôtel où le cuisinier savait très bien parler coréen ET japonais ? A ce train-là ils n’iraient se coucher qu’à minuit ! L’ange monta les escaliers jusqu’au deuxième étage, entra dans la chambre mais ne referma pas la porte tout de suite. Il enfila un pantalon en lin blanc et un haut de même matière avec des manches langues. Après s’être aspergé le visage, il prit un livre et cala son dos contre l’oreiller, la tête posé contre le mur.

Mais seulement quelques minutes après ses yeux se fermaient et il s’endormit…sans Ren à ses côtés. Il se retrouva à nouveau dans les cieux, cherchant le médium, criant son nom des centaines de fois sans réponses, les ailes déployées. Quand soudain des anges l’attrapèrent et le menèrent vers Dieu, qui attendait assis sur son grand siège blanc et doré, parlant avec un de ses fils. Ses sourcils broussailleux mais qui n’enlevaient pas à sa beauté devinrent sévère devant lui et il chassa l’homme pour se tourner vers lui.

- Tu me déçois. Je pensais t’avoir éduqué.
- J’ai fais ce qui était juste. Je n’ai rien à me reprocher.
- Tu m’as désobéi !

Ezeckiel inclina juste la tête en signe de pardon mais bien sûr, ça ne suffit pas.

- Je suis obligé Ezeckiel, crois-moi que ça ne me fait pas plaisir de sacrifier un de mes enfants.
- 1 de perdu, 10 de retrouvés, fit sarcastiquement l’ange qui, sous son arrogance tremblait de peur et de détermination.

Mais dans le cas de Dieu c’était juste de le dire. Il savait très bien qu’il serait vite remplacé.

- Tu ne fais rien pour m’aider.
- Ça ne changerait pas votre avis.
- Tu as raison. Tu sais donc ce qui t’attends non ?

L’ange ne répondit pas et s’accroupit au sol, attendant sa sentence. Son geste surpris les anges derrière lui mais que pouvait-il faire d’autre que de se résoudre ? Il savait bien ce qu’il avait fait mais jamais il ne changerait son geste, pour rien au monde. Cet humain n’avait pas le droit de mourir aussi vilement.

Les cris commencèrent à partir de là, pourtant il s’était juré de ne pas pleurer. Mais les larmes coulaient toutes seules, il hurlait à s’en déchirer les poumons, ses ailes blanches brûlaient derrière lui et personne ne venait l’aider. Mais comment repousser ce phénomène ? Il essaya mais ça ne marchait pas. Alors il supplia qu’on vienne l’aider, il appela Ren. Lui seul pouvait arrêter ce brasier qui le faisait mourir à petit feu. Il se mit à essayer de frapper les anges malfaisants autour de lui qui le regardaient sans rien faire, comme si c’était normal. Ils étaient frères !

Mais à l’instant où il entendit sa voix, tout changea. La douleur se fit moins présente, il arrêta de bouger, s’allongea par terre et ferma les yeux alors qu’une douce chaleur l’envahissait et la dernière chose qu’il vit fut le visage contrarié de son créateur qui le poussa du ciel d’un coup de pied violent.

Le jeune homme papillonna des yeux avant de les ouvrir complètement et de les plisser. La lumière du plafond lui faisait mal aux rétines, dans son dos les petites bosses indiquant la sortie de ses ailes disparurent et il regarda autour de lui. Ren le tenait dans ses bras mais…tous les élèves étaient là, avec des yeux écarquillés et l’un deux se tenait la joue. Aussitôt leur présence, qu’ils aient vu ça l’affola et sa respiration s’accéléra et il serra la main du médium qui comprit et leur demanda de retourner dans leurs chambres. Que se chuchotaient-ils ? Plus jamais il ne pourrait les regarder en face, il n’avait plus qu’à démissionner…

- Je suis désolé...j'aurais du monter en meme temps. Je suis vraiment désolé mon ange....

Yûto ne répondit pas mais hocha négativement la tête. C’était de sa faute, il devait pouvoir contrôler ces crises non ? Il grimaça un peu en se relevant.

- Tu as mal, Yuto ?
- Mon dos…Ils n’ont pas vu ?

En fait c’était ça le pire, qu’ils aient pu voir le début de ses ailes, qu’ils soient horrifiés devant lui. Ren le rassura qu’ils n’avaient rien vu et qu’ils oublieraient. Il en doutait. On n’oublie pas ce genre de chose.

Il se laissa aller dans ses bras mais malgré ses efforts il ne dormit plus, impossible. Le mal le rongeait et finalement le magicien ferma les yeux. L’ange déchu se détacha de son étreinte et fixa les lueurs la ville de la fenêtre pendant tout le reste de la nuit. Vers 8h30 du matin il se lava et s’habilla et passa dans les couloirs, frappant à chaque porte, réveillant ses élèves. Ceux-ci, quand ils voyaient la personne derrière la porte prenaient un air surpris et gêné.

- Rassemblement en bas dans 10 minutes.

Et ce fut ainsi avec toutes les chambres. Finalement ils furent tous là et Yûto marcha lentement vers une des tables de la salle de restauration, s’assit en soupirant sur l’une d’elles et se massa les tempes. Son dos lui faisait encore un peu mal. Ses élèves le regardaient bizarrement.

- Je suis désolé. Désolé de ce que vous avez pu voir. Désolé…

Il baissa la tête, tellement honteux.

- Ça ne ressemble pas trop au professeur que vous connaissez n’est-ce pas ? Je suis pitoyable. Je ne vois même pas pourquoi j’enseigne…
- Tsukushi, qu’est-ce qu’il s’est passé…là-haut ? On vous aurait dit possédé !

Le garçon qui parla avait encore la joue rouge et il s’excusa de l’avoir frappé.

- Dites-nous ! On peut comprendre.
- Je…suis malade.
- Malade ??
- Oui. J’ai…Vous connaissez le trouble bipolaire ?
- Ah oui, j’ai lu ça je ne sais où. Mais c’est soignable.
- Pas pour moi. Ce n’est pas la première fois que ce genre de…crise m’arrive mais pendant un temps j’ai su les éviter grâce à Ren.
- Pourquoi ?
- Il s’avère que ça m’arrive quand je suis tout seul et sans personne de confiance à mes côtés.
- Et hier Manobu est resté parler avec le cuisinier…
- Tout juste, fit l’ange avec un demi-sourire.

Tout était arrivé si vite ! Seulement quelques minutes et tout avait viré au cauchemar. Il se tordit nerveusement les doigts et grimaça.

- Ça vous fait mal ? Votre dos.

Yûto sursauta. Alors ils avaient vu ??

- P-pourquoi ?
- Hier vous sembliez avoir mal au dos, vous ne le posiez presque pas sur le lit, comme s’il vous brûlait.

Perspicace décidément. Il allait répondre que ce n’était rien quand Ren entra dans la salle.

Oui sur le coup sa plus grande peur avait été qu'ils découvrent ce qu'il était. Un ange ça pouvait fasciner, un ange déchu moins. Les gens étaient éblouis par des ailes immaculées, peureux devant les ailes noires et horrifiés devant les ailes grises. Le gris, c'était un mélange de ces deux couleurs, une abomination.

-Non, rien, ils n'en ont pas eu le temps. Repose toi maintenant...

Se reposer, facile à dire, il n'y arriverait plus ce soir. Le jeune homme tenta de se redresser mais cacha mal son mal de dos. ça arrivait quand ses ailes manquaient de sortir sans son autorisation et qu'elles disparaissaient sans s'être déployées totalement. Comme si elles étaient bloquées quelque part en lui. Il voyait bien en plus que Ren était fatigué, pourtant celui-ci insista pour essayer de faire partir la douleur. Épuisé, il finit par se laisser faire, comme une loque. Pourtant vers minuit et demi et parce que les massages ne l'aidaient pas, il lui ordonna presque d'aller coucher. Le médium n'insista pas beaucoup et peu de temps après il vint se coucher à côté de lui, s'endormant presque plus vite qu'un bébé.

-Bonne nuit, Yuto...Je suis là maintenant.

Il ne dormit pas même une seconde. Il avait toujours mal et même avec sa présence il redoutait de fermer les yeux. Il finit par contempler la ville illuminée depuis la fenêtre et le matin venu, décida de jouer franc jeu. Yûto y avait pensé toute la nuit et il ne pouvait tout simplement pas faire comme si rien ne s'était passé en face de ses élèves. C'était lâche et il perdrait leur confiance durement gagnée. L'anga s'habilla et sortit pour frapper à chaque porte, réveiller chaque groupe et leur dire de descendre en bas pour un rassemblement. Aucun ne protesta, sûrement encore effrayé par son comportement de la veille, le vrai Yûto, pas que le prof cool et classe au sourire étincelant et à la connaissance illimitée.Quand tout le monde fut rassemblé, il leur expliqua. Pas tout évidemment mais le fait était qu'il était malade et que rien ne pourrait changer quoique ce soit à son état, à part l'humain. Que ferait-il quand il ne serait plus là ?

Sincèrement, il ne pensait pas que les élèves aient vu son mal de dos horrible qui le faisait se tenir si droit que s'en était impossible. Bon il se tenait ainsi normalement mais là plus que d'habitude. Avoir des élèves trop perspicaces, ce n'était pas si bon des fois. Comment leur expliquer que son mal de dos était dû à des ailes qu'il avait empêché de sortir de toutes ses forces, provoquant la douleur ? Encore une fois, sans le savoir Ren fut une délivrance.

-Qu'est ce qu'il se passe ?

Les élèves détournèrent leurs regards vers lui, l'empêchant de répondre. L'ange souffla de soulagement devant le répis que lui offrait la venue du médium, qui s'occupa du reste. A vrai dire Yûto n''osai pas leur demander de se taire, mais Ren n'hésita pas. Finalement il annonça le petit-déjeuner, ce qui en ravit plus d'un et l'ange relâcha toutes les tensions dans son corps dûes à la conversation.

Il sourit faiblement quand le magicien passa un bras autour de sa taille et il s'y laissa aller quelques instants.

-Je les trouve drôlement attachant...

Son baiser candide sur la joue le réchauffa et lui redonna un peu de force.

- C'est dommage, pour hier soir, je n'avais pas envisagé ce genre d'évènements pour notre première nuit en Italie...

Devant les petites rougeurs sur ses joues il fit semblant de n'avoir rien dit et l'entraîna vers les tables à manger.

Heureusement pour eux, l'incident sembla être oublié et l'enthousiasme des élèves le gagna. L'ange finit par manger avec appétit et les pressa tous comme d'habitude pour qu'ils se préparent à partir. Le reste de la mâtinée ils firent un tour sur les places ensoleillées et l'après-midi le cours débuta. Son cours improvisé sur les tragédies antiques, tout en visitant les bâtiments historiques, sembla passionner tout le monde, Ren le premier. A chaque fois qu'il disait quelque chose il ouvrait grand les yeux, regardait autour de lui et faisait un "Ooooh" d'émerveillement comme un enfant. Les élèves, agacés au bout d'un moment d'entendre des exclamations toutes les 5 minutes, finirent par l'engueuler et le magicien vint bouder derrière lui, provoquant l'hilarité générale. Tout c'était vraiment bien passé.

Il laissa quartier libre aux lycéens pour mettre en place son prochain cours, sur les personnages emblèmes de l'ancien temps et commença à prévoir quand aller au Colisée. Parce qu'il était hors de question de ne pas y aller ! Quand à Ren il partit mystérieusement, prétextant aller se promener dehors. En se pencha par la fenêtre Ezeckiel le vit rentrer dans la petite bibliothèque et sourit silencieusement. Cet humain avait vraiment un souci d'infériorité. Est-ce que lui essayait de devenir magicien ? Valait mieux pas qu'il essaye, au risque d'en blesser. Mais bon, ça lui faisait plaisir qu'il fasse des efforts et il n'allait pas le restreindre comme un toutou, après tout apprendre une langue ou des informations sur un pays pouvait servir.

Près de 15 minutes après que Ren soit parti, on toqua à sa porte. L'ange fronça les sourcils et alla ouvrir, tombant sur un de ses élèves, Min-Ho, le plus discret qu'il ait jamais vu. Pour l'avoir beaucoup observé il savait qu'il était timide et surtout soucieux de bien faire. Et seul, horriblement seul. Devant son air un peu perturbé il le laissa entrer sans un mot, attendant qu'il fasse le premier pas, ne souhaitant pas le brusquer. Min-Ho était un peu plus petit que lui, de constitution fragile, mince et la peau blanche, les traits fins et des grands yeux chocolats. Ses grands cils et son visage androgyne pouvait le faire confondre parfois avec une fille. En croisant son regard il vit qu'il était troublé et le fit s'assoir sur le lit, le suivant de près. Penchant la tête sur le côté pour le fixer, il le questionna du regard. Qu'est-ce qui l'avait poussé à venir frapper à sa porte ?

- Je...où est Manobu-san ?
- Sorti. Pourquoi ?
- Je ne veux pas vous déranger.
- Tu ne me dérangeras jamais Min-Ho. Dis-moi plutôt ce qui ne va pas.
- J'aimerai vous...poser quelques questions...mais...
- Mais quoi ?
- C'est un peu...personnel.

Yûto fit juste un léger sourire encourageant, attendant la suite.

- Est-ce que..ça a été dur de...d'avouer vos sentiments à Manobu-san ?

Alors c'était ça. Bien qu'assez naïf pour un ange, il avait tout de même reconnu ce regard perdu et incertain, ces joues rouges et cet air effrayé qu'il avait lui-même eut en l'apprenant. Son élève était amoureux, et pour qu'il lui demande ça devait être un garçon. Il chercha rapidement dans sa tête la personne à qui ces sentiments pouvaient s'adresser et crû deviner.

- Tu es amoureux Min-Ho ?
- Eh ?? fit ce dernier en rougissant. C-Comment vous savez ?
- On ne peut pas toujours être bon comédien avec certains sentiments. C'est Sang-Hoon n'est-ce pas ? Je me trompe ?

A voir sa tête il avait tapé juste. Le jeune homme tripota nerveusement les petites mèches de cheveux qui barraient son front minuscule et l'ange l'arrêta d'un geste.

- Déjà, il sait ce que tu ressens ou pas ?
- J-je ne crois pas. En fait je sais qu'il ne m'aime pas. Il me traite toujours méchamment, depuis 3 ans qu'on se côtoie tous les jours en classe il m'insulte et m'humilie. Pourquoi c'est comme ça ? Qu'est-ce que je dois faire ?

Yûto ne put s'empêcher de penser au Ren sarcastique et mauvais qu'il était à leur "première rencontre" et lui sourit avec chaleur.

- Tu sais, ça ne veut pas toujours dire qu'il ne t'aime pas. Peut-être qu'il fait ça parce qu'il a peur de toi.
- De moi ?
- Ou plutôt de ce qu'il ressent pour toi. Ecoute, ça n'a pas été facile avec Ren.
- Pourtant vous semblez si proches...
- Mais ça n'a pas toujours été ainsi. Il m'a longtemps détesté et lorsque j'ai su que je l'aimais et qu'il m'aimait aussi, je l'ai rejeté. Plusieurs fois, parce que je ne voulais pas l'accepter. Je ne voulais pas lui faire de mal. Tu as vu hier, je ne suis pas tout blanc.
- Mais alors comment...?
- Il a fallu qu'on essaye de me le voler pour que je me réveille. Et on a parlé, beaucoup parlé. Il faut que tu parles Min-Ho, tu resteras bloqué à ne rien faire. Tu ne mérites pas d'être triste.
- Et s'il ne veut pas de moi ? Qu'il me déteste encore plus ? Je ne le supporterai pas.
- ça n'arrivera pas. Et si oui, alors viens me voir. Tout peut s'arranger, les peines de coeur avec le temps. Montre-lui quelle personne formidable tu es, que s'il ne se bouge pas il te perdra. Mais toi aussi il faut que tu fasses des efforts. D'accord ? Ce n'est pas facile, mais rien ne l'est.
- Vous pensez vraiment qu'il y a une chance ?

L'ange hocha la tête avec conviction, même s'il y avait 50% de chance qu'en effet Sang-Hoon ne l'aime tout simplement pas. Mais il sentait le coeur pur et sincère de ce garçon et espérait du fond de son coeur qu'il puisse réussir comme lui l'avait tardivement fait.

Après l'avoir rassuré une dernière fois Min-Ho partit et tout de suite après Ren entra dans la chambre. Décidément il ne pourrait jamais préparer ses cours tranquillement ! Le médium semblait particulièrement joyeux et sauta carrément sur lui dans le lit, envoyant valser ses papiers.

- Mais Ren ! Mes cours !

Mais il céda bien facilement et prit le châtain dans ses bras en souriant.

-Un de tes élèves m'a demandé conseil.

Ah bon ? Lui aussi ? Bizarremment il sentit quelque chose, comme si...il y avait un lien entre les deux visites.

- C'était Sang-Hoo ?

Ren le regarda avec de grands yeux. Evidemment il ne connaissait pas le nom des élèves. Alors il lui demanda de le lui décrire et au fur et à mesure qu'il l'écoutait, il sut qu'en effet c'était lui.

- Qu'est-ce que Sang-Hoo a bien pu te demander à TOI ?

La remarque fit bouder le magicien et Yûto dû user de milles ruses pour le convaincre de parler, même si en sentant le doute dans l'esprit de Ren il était à peu près sûr de quio il s'agissait.
Et quand le jeune homme commença à lui expliquer, il sû qu'il avait vu juste.

- Mmmmmh.

Yûto était vraiment quelqu'un de très travailleur, sa grande connaissance ne s'était pas acquise toute seule ! Il aimait apprendre comme il aimait faire apprendre aux autres. Il pensait que plus on en découvrait sur le monde et plus en découvrait sur soi. Et pour ça il aimait le théâtre. C'est pourquoi lorsqu'il commença à travailler sérieusement, Ren pu faire tout ce qu'il veut il ne céda pas, même devant ses avances pourtant aguicheuses et qui le tentaient drôlement. Mais son statut de professeur primait ici, alors il devait s'y tenir. Que dirait le directeur du lycée s'il apprenait qu'il avait préféré batifoler avec son petit-ami plutôt que de préparer un cours constructif à ses élèves ? Non il s'était beaucoup trop attaché à eux pour les laisser tomber comme ça.

Finalement le médium partit à la bibliothèque d'en face, ce qui le fit sourire.

Ayant une bonne mémoire visuelle, l'ange avait retenu le nom et le visage de ses élèves après seulement un jour passé à leur enseigner, ce qui avait forcé leur respect. Ils se plaignaient souvent de l’inattention des profs et il était vrai, peu s'occupaient de leurs problèmes. Donc oui, Min-Ho, quoiqu'il pouvait bien en penser ne lui était pas du tout inconnu. Au contraire, c'était l'un des premiers qu'il avait repéré. En même temps il était si discret et si...féminin que s'en était troublant ! Il le fit entrer et l'écouta attentivement. Il ne savait pas vraiment si oui ou non il pourrait l'aider, mais en écoutant son histoire il pensa à la leur et il tenta autant qu'il le pu de le rassurer. Comme lui avec Ren, il y avait une chance que ça finisse à peu près bien. A son grand bonheur le jeune homme sembla reprendre un peu de confiance en lui et partit avec un léger sourire détermiiné sur les lèvres.

Quand Ren rentra peu de temps après, il était d'une humeur rarrissime et surtout un peu trop joueur. L'ange vit se faire balancer le cahier sur lequel il notait tout ses cours, alors qu'il était en plein milieu d'une phrase et râla sérieusement contre le médium qui s'assit carrément sur lui et l'encercla de tous les membres de son corps.

- Laisse tomber, tu es encore meilleur en impro.
- T'es...pas possible toi !

Fit-il en souriant subitement. Ah vraiment, s'il n'y avait pas eu ce maudit cauchemar la veille...D'ailleurs Yûto profita de la position pour lui mordiller les clavicules, ce jusqu'à ce que son esprit soit détourné par la phrase de son petit-ami. Un élève ? Lui demander conseil ?

En écoutant Ren il comprit rapidement qu'ils étaient tombés sur le même problème, chacun avec une partie différente. Il sourit bêtement en apprenant que les espèrances de Min-Ho ne tombait pas à l'eau. S'il avait le courage de faire ne serait-ce qu'un petit pas, alors il pourrait avoir Sang-Hoo.
Cependant il ne pu s'empêcher de faire la remarque sur le fait que le jeune homme avait préféré s'adresser au magicien plutôt qu'à lui.

-Hey qu'est ce que tu veux dire par la ??
- Mais rien mon amour.

Pourtant ça ne lui plu pas vraiment et l'ange dû faire beaucoup pour le ramener à lui. Etait-ce les baisers dans le cou ou les petits mots doux qui marchèrent ? Seul Ren le savait !

- Il m'a dit qu'il était amoureux d'un garçon...Mais à cause des problèmes avec ses parents....Et bien il ne trouve pas le courage de tout lui dire.

L'ange faillit en rigoler. Apparemment il n'y avait pas que lui qui avait un problème de conscience en ce qui concernait les personnes qu'il aimait. Sang-Hoo était décidément très cachotier !

-Pourquoi tu savais que c'était lui ?
- Haha tu n'es pas le seul médium...non sans rire, Min-Ho est venu me voir pendant que tu n'étais pas là et il m'a avoué qu'il aimait Sang-Hoo. Donc, normalement, et je l'espère, Sang-Hoo doit aimer aussi Min-Ho. Si ce n'est pas le cas et qu'il aime quelqu'un d'autre ça va être dur pour lui mais j'ai le sentiment qu'ils y arriveront...s'ils arrêtent de se tourner autour comme ça ! En 3 ans quand même...

Ils réflèchirent silencieusement chacun de leur côté pendant quelques secondes, avant que le médium ne prenne la parole en premier.

-Je pense que Sang Hoo devrait vraiment prendre son courage à deux mains...Ses parents finiront par l'accepter.
- Enfin il ne faut pas non plus qu'ils les mettent à part. Min-Ho doit faire autant d'efforts à mon avis de son côté. Ce n'est pas en reniant totalement ses parents qu'ils seront heureux !

Apparemment sa théorie de "chacun doit se lancer et avoir l'accord et la bénédiction des parents" ne plu pas à Ren. Et pourtant Yûto refusa catégoriquement de changer d'avis, argumentant qu'un couple impliquait que les deux fassent des efforts et que la famille comptait énormément quand même, qu'il ne fallait pas tout faire dans leur dos. Le médium commença à moitié à l'engueuler et dire que les parents n'avaient pas leur mot à dire, qu'un couple c'était deux et sans les autres. Et qu'il y en avait toujours un pour faire plus d'efforts que l'autre. Choqué qu'il pense ainsi, ils bataillèrent pendant quelques minutes, s'écartant l'un de l'autre au fur et à mesure et l'ange était si énervé qu'il ne contrôla pas ses mots.

- De toute façon toi t'as pas de famille, c'est pas ta mère défunte qui va t'empêcher maintenant d'être avec moi ! Et puis s'il n'y avait pas eu Refus rien n'aurait changé entre nous.

Il regretta tout de suite ses mots mais trop tard, Ren le regardait d'un air vexé et meurtri et quitta la chambre sans rien dire.

- Attends Ren, je suis désolé ! Je ne voulais pas dire ça !

Mais bien sûr le médium ne l'écouta pas. Ezeckiel se fit force pour ne pas laisser aller sa colère et pour oublier sa bêtise, chercha à aider les deux jeunes gens. Il sortit à son tour et alla trouver Sang-Hoo pour lui parler.

Il lui dit que le magicien lui avait confié leur entretien et le rassura, le persuadant de suivre son coeur et non pas sa tête. Bien sûr ses parents comptaient, et so tout se passait bien il ne devrait pas attendre avant de les informer. La famille compte plus que tout. Le jeune homme acquiesça, soudainement confiant.

Quelques minutes plus tard, alors qu'il cherchait toujours Ren pour s'excuser, il surprit les deux jeunes hommes dehors, derrière l'hôtel. Min-Ho tripotait encore nerveusement sa mèche, les joues totalement rouges sur sa peau blafarde et Sang-Hoo avait un un sourire sincère qu'il ne lui avait encore jamais vu. Le plus grand hésita un moment, et finalement prit son ami, et bientôt petit-ami, dans ses bras. Yûto sourit bêtement en voyant que tout avait marché comme sur des roulettes. Le plus petit s'accrochait au brun en pleurant et en rigolant en même temps. ça lui fit encore plus amèrement regretter cette stupide dispute. Il n'avait pas prévu de se faire voir, mais au lieu de s'en offusquer ses élèves s'approchèrent de lui et, quoiqu'un peu gênés, le remercièrent chaleureusement. Min-Ho était toujours aussi rouge et le fut encore plus lorsque le jeune homme prit sa main avec confiance. C'était beau à voir.

- Bon on va manger à présent ?

Ils acquiescèrent et le suivirent jusqu'à la salle de restauration. Les autres étaient là, tous sauf Ren ce qui le rendit nerveux. Mais où il était bon sang ? les deux jeunes gens avaient pris de plus en plus d'assurance et maintenant se tenaient fermement par la taille devant tout le monde, ignorant les exclamations. ça le fit sourire et à ce moment-là il le vit arriver, souriant aussi en les voyant. Malgré lui Yûto fit un regard de "tu vois on a réussi" et lui aussi accueillit son petit-ami dans ses bras, provoquant sifflements et tout le tralala.

Il s'excusa encore un nombre incalculable de fois, jamais il n'avait réellement pensé ça bien au contraire ! Il respectait la mère de Ren plus que quiconque encore parce que malgré tout elle avait fait de lui quelqu'un de bien. Il faillit se donner en spectacle en souhaitant l'embrasser partout mais se souvint bien vite qu'ils étaient entourés. Ils s'assirent tous finalement à table, ça se calma un peu entre eux tous mais Yûto avait toujours cette maudite question à la bouche qui le taraudait.

- Tu me pardonnes ?

Pour cette fois peut importe les petites moqueries sympathiques des élèves ou les sifflements subjectifs, Yûto était trop heureux d’avoir retrouvé Ren qu’il se permettait de l’embrasser à pleine bouche.

- Tsukushi ! Faites attention où il va s’enflammer !

C’est vrai que le médium était plus ou moins réactif et l’ange ne put s’empêcher de descendre ses lèvres dans son cou, le suçotant amoureusement. Mon dieu que la sensation d’une dispute était gênante ! Et puis la culpabilité aussi, parce que peu importe le nombre de fois où il lui avait dit que ce n’était pas de sa faute, il était persuadé que ce qu’il avait dit y était pour beaucoup, et il regrettait vraiment.

Bizarrement le magicien ne fut pas surpris du dîner et Yûto sourit bêtement lui aussi en le sentant se reposer contre son épaule alors qu’ils finissaient de manger. Dans la joie et la bonne humeur évidemment. Sang-Hoo et Min-Ho étaient assis l’un à côté de l’autre, l’un rouge comme une tomate et l’autre râlant contre ses amis qui sortaient des bêtises sur eux. Finalement le plus grand avait pris son nouveau petit-ami par les épaules et avait fait une grimace aux autres, les faisant plus rire que se vexer.

Après s’être assuré que oui, il ne lui en voulait vraiment, mais vraiment pas, il put se détendre. Par contre il ne s’était jamais douté qu’en si peu de temps Ren ait pu apprendre autant de mots italiens, et surtout des mots…et bien qui ne se disaient pas en public. Si bien qu’au bout de quelques minutes à l’entendre murmurer ainsi à son oreille, il devint aussi rouge que Min-Ho avant lui et évita tout le monde du regard, surtout lui.

Avec tout ça il pensait qu’ils iraient au lit directement, Yûto avait vraiment envie de passer un peu de temps seul avec lui, vu que la veille ça avait été carrément impossible. Pas forcément aller très loin non plus, mais juste un contact intime qui le ferait s’endormir apaisé. Seulement le médium avait bien sûr une autre idée en tête et il ne lui fallu pas longtemps pour le convaincre de retourner ensemble aux ruines.

- T…Rha !

Fut seulement ce qu’il pu dire avant d’avertir les élèves qu’ils sortaient peu de temps et revendraient au plus vite. Connaissant le jeune homme et son caractère, ce ne serait pas le cas. Pour plus de sécurité avec la nuit tombante, ils louèrent une voiture qui les mena aux ruines. Là, l’ange s’assit en premier sur l’herbe et accueillit Ren sur lui, le faisant quand même un peu frissonner. L’herbe était un peu froide mais ça passa vite. Pipelette, le magicien ne se fit pas prier pour commencer à parler et finalement il suivit la conversation, parlant du voyage, de ce qu’ils voulaient faire, du programme…

-C'est vraiment beau un couple qui avance dans sa relation...Ils sont vraiment mignons.

Avancer…ce mot réveilla en lui la chose qui le torturait depuis déjà quelques jours. Ils n’étaient pas un couple modèle, loin de là. Avec eux tout allait trop vite. 1 seconde après s’être avoués qu’ils s’aimaient ils avaient déjà une relation sexuelle, c’était pout dire. Mais ils étaient heureux ainsi alors, hésitant toujours, il capta l’attention de son petit-ami.

- Qu'est ce qu'il se passe ? Tu as l'air préoccupé.
- Je….

L’ange le poussa pour se relever et en prenant ses mains dans les siennes, plongea son regard noir dans le sien, soudainement très sérieux.

- Est-ce que tu veux vivre avec moi ? Enfin…emménager avec moi ?

Il attendit en se mordant les lèvres. Et s’il disait non au final ? Ce serait totalement gênant entre eux après. Mais il ne tarda pas avant que Ren ne se jette à son cou, le faisant basculer en arrière.

- Oui ! Oui !
- Eh ! C’est bon ! fit-il en rigolant. Je ne te demande pas en mariage !

A cette phrase il se mordit la langue cette fois, se demandant pourquoi il avait dit ça. Son inconscient ? Bah, tant pis, ils verraient bien le moment venu ! Vu que le médium était toujours sur lui, il en profita pour faire ce qu’il n’avait pas pu devant les élèves, c’est-à-dire le toucher partout, le caresser, le mordiller et le faire soupirer surtout. Oh oui ses petits soupirs contre son oreille valaient milles lingots d’or. Ren était monté sur lui, positionné au-dessus et trouvant cette position inconfortable, il le fit basculer pour inverser leur position et profiter pleinement de la vue de son amant allongé sur l’herbe verte de l’Italie, totalement abandonné à lui. S’il l’avait voulu il aurait pu aller plus loin, tous les deux en avaient envie.

Mais ils ne le firent pas, se le gardèrent pour plus tard parce que mine de rien, il faisait maintenant noir et frais, si frais qu’entre deux baisers passionnés ils frissonnèrent en même temps.

- Bon on va y aller, ils vont s’inquiéter.

Mais c’était surtout que s’il restait 5 minutes de plus allongé là, froid ou pas il le déshabillerait pour le réchauffer ensuite à sa manière. Et oui il savait exactement comment le faire ! Pourtant il l’aida à se lever et un bras passé autour de ses épaules, ils retournèrent à la voiture. Une fois dedans ils mirent la radio italienne, dont Ren essaya tout d’abord de traduire chaque phrase et, énervé parce qu’il n’y arrivait pas, finit par mettre de la musique.

Puis ils commencèrent à parler des changements lorsqu’ils rentreraient. A la base Yûto souhaitait que ni l’un ni l’autre ne garde son appartement mais sachant que celui de son petit-ami appartenait à sa grand-mère et que du coup il ne payait rien, ou pas grand-chose, alors leur choix se porta en ce sens. L’endroit était assez grand pour les accueillir eux-deux et finalement d’un commun accord ils décidèrent d’habiter ensemble chez Ren.

Ensuite la conversation dévia sur des choses futiles. L’ange était en pleine conversation lorsqu’il sentit les roues de la voiture dévier. Ezeckiel savait très bien conduire, mieux que quiconque. En plus de ça la route était droite. Les mains fermement agrippées au volant, il ne comprit pas pourquoi la voiture tourna alors qu’il disait le contraire. Il tenta de freiner mais à la place la voiture accéléra. Il eut à peine le temps d’entendre le cri de mise en garde du médium avant de voir le poteau arriver en face et dans un ultime geste, il essaya de protéger le jeune homme.

Mais tout ce qu’il entendit fut un bruit d’impact, de verre brisé et un corps fut expulsé de la voiture.

La route était droite, sans obstacle, juste ce poteau un peu plus loin, un poteau d’électricité. Il conduisait à 65 seulement, il l’avait vu de loin ! Alors il ne comprit pas pourquoi soudainement la voiture dévia, pourquoi alors qu’il freinait pour s’arrêter la voiture accéléra, frôlant les 95.

- Attention, réveille-toi.
- Je ne dors pas !

Toute sa panique remonta, se sentant clairement dans sa voix et il tourna le volant à l’opposé du poteau mais ça ne changeait rien, le volant ne semblait même plus rattaché aux roues. Alors il lâcha tout et tenta de protéger Ren assit à côté. Mais trop tard. La voiture rentra dans le poteau, la tête de Yûto frappa violemment sur le volant et il entendit juste du verre se briser. L’airbag se déclencha trop tard et faillit l’étouffer. Au bout d’une ou deux minutes, peut-être plus ?, il se releva tant bien que mal et regarda autour de lui, effrayé de ne voir personne. La glace était brisée et il se détacha rapidement, sortit en titubant de la voiture et alla aussi vite que possible auprès du médium allongé par terre sur la route.

- Ren ! Ren ! Réveille-toi !

Mais il avait beau le secouer, pas un signe. Cependant son pouls était bien là alors l’ange se calma un peu et se précipita sur la route pour arrêter une voiture. Heureusement un couple de petits vieux s’arrêta en le voyant et grâce à son italien parfait il pu leur expliquer la situation. Aussitôt ils acceptèrent de les transporter à l’hôpital. Bien sûr il savait très bien qu’on ne devait jamais bouger un blessé mais c’était un cas de force majeur, il fallait faire au plus vite pour sa santé et attendre une ambulance n’était pas le bon choix.

A peine arrivé les urgentistes prirent les commandes, l’ange les suivant de près et refusant qu’on s’occupe de lui tant que le magicien n’était pas en sécurité. Le jeune homme saignait sur le côté droit mais heureusement ils purent arrêter ça rapidement et ils annoncèrent bientôt qu’il était hors de danger. Il fut emmené dans une chambre individuelle où un médecin s’occupait de lui, pendant qu’n le forçait à rester aux urgences pour le soigner. Il n’avait que quelques écorchures et une bosse, rien de bien grave comparé à son petit-ami.

Le pire c’était qu’il savait qui avait fait ça. Qui contrôlait la voiture, l’empêchant de freiner ou de tourner. En fait il le su plus car il l’avait entraperçu, dans un coin de l’hôpital. Il l’avait vu, cet air démoniaque sur un visage d’ange à la beauté éternelle. Mais il ne lui avait pas couru après, à cause des infirmières et parce que Ren avait besoin de lui. Pourtant il montra bien à l’autre ange qu’il ne le laisserait pas s’en sortir aussi facilement.

Le médecin lui interdit de voir le médium avant le lendemain parce qu’il était soi-disant trop faible. Mais impossible de ne pas y aller ! Alors il fit semblant de dormir sur un des petits lits de la salle d’urgence, attendant, s’assoupissant quelques minutes parfois et finalement il demanda à appeler. A l’hôtel le directeur lui répondit et il lui expliqua qu’ils avaient eu un accident de voiture, qu’ils ne rentreraient que demain et qu’il fallait prendre soin des élèves et leur dire que le cours serait annulé. L’homme lui tint la jambe près d’1/4 d’heure et enfin il pu se faufiler dans les couloirs.

Il trouva rapidement sa chambre, y pénétra lentement et silencieusement et fut ravi et inquiet de voir qu’il ne dormait pas. Le connaissant, il l’attendait ! Aussitôt il se jeta dans ses bras.

- Je suis désolé Ren, je n’ai rien pu faire. Je ne contrôlais pas la voiture. C’est un ange, je l’ai vu…Je suis désolé, je t’apporte tellement de souffrance…

Il resserra sa prise et soupira dans son cou.

- Ça va bien se passer, tu pourras sortir demain, il faut juste que tu te reposes. D’ailleurs je ne devrais pas être là mais…je voulais tellement te voir ! Oh Ren je suis désolé. Si seulement…

Quoi ? Il n’était pas un ange ? On ne voulait pas le tuer ? Il aurait pensé à cette éventualité ? Ça ne servait à rien de penser ça, le mal était fait et il le regretta amèrement. Il aurait dû se douter que Dieu n’abandonnerait pas avec Refus.

- Je nous vengerai, ils paieront pour ça un jour ou l’autre. Je te le promets.

Le médium se décala un peu dans le lit et, regardant vers la porte, il monta dessus et se faufila sous les couvertures chaudes, se collant au corps brûlant de son amant. Aucun n’avait grand-chose à dire sur la situation. Ils auraient dû se méfier, ne l’avaient pas fait et en payaient les conséquences. Seulement là ils n’allaient pas s’apitoyer sur leur sort. Si Dieu voulait jouer à ça, alors Yûto acceptait volontiers de commencer la partie.
Mais pour l’instant il tenta d’enlever les douleurs de Ren en lui posant de légers baisers chastes un peu partout de son front à son cou, leurs doigts entremêlés jouant ensemble. Au final il s’endormirent l’un contre l’autre, épuisés par cette journée de dispute, d’accident et de décision importante.

(…)

Le réveil ne fut pas brutal mais ne se fit pas en douceur non plus. Parce qu’une infirmière était entrée dans la chambre pour voir l’état de santé du médium et qu’au lieu de le voir lui, avait vu deux corps emmêlés dans le même lit minuscule, et la femme reconnu tout de suite le propriétaire de ces cheveux noirs. Elle commença à râler en italien, ce que Yûto comprit très bien mais au lieu de descendre du lit, il se cacha sous les draps avec Ren et commença à lui traduire tous les gros mots et autres que l’infirmière disait, exaspérée par leur comportement infantile.

- Mr. Tsukushi, si vous voulez qu’il parte avec vous il faut qu’on lui donne les derniers traitements ! Ou il reste 2 jours de plus.
- Non !

Fit l’ange en sortant brusquement du lit. Il resta à côté de lui tout le long de l’examen baillant à s’en décrocher la mâchoire sous le regard noir de la femme et finalement le médecin autorisa la sortie à condition qu’il se repose pendant minimum 1 jour complet, le mieux étant deux. Repos donc pas d’activités demandant trop de concentration ni trop d’efforts. Donc adieu la magie et adieu…ça. Et dire qu’ils en étaient si proches la veille ! C’était la deuxième fois que ça leur faisait ça !

Yûto aida son petit-ami à s’habiller et à marcher jusqu’à la sortie. Prévenu par le jeune homme, le sympathique cuisinier était venu les chercher avec sa camionnette et il ne mentirait pas en disant qu’il avait eu peur tout le trajet que le cauchemar recommence, mais non. Ren aussi craignait ça, il le voyait bien. Une fois garés, l’italien l’aida avec le magicien et à peine passé les portes…

Une foule d’élèves s’agglutina autour d’eux, faisant plus de bruit qu’un essaim d’abeilles. Craignant que ça n’épuise encore plus le jeune homme, il finit par demander le silence. Bizarrement c’est Min-Ho qui parla avec tout le monde.

- Qu’est-ce qu’il s’est passé ? Pourquoi vous étiez à l’hôpital hier ?

Les retrouvailles fut éprouvantes, ils s’étaient manqués tous les deux depuis seulement quelques heures, mais essentiellement dû à l’accident et leurs inquiétudes respectives. Il se demanda comment il allait expliquer leur absence à ses élèves parce que ça n’avait rien de normal ! Mais pour l’instant seul Ren comptait et il le serrait dans ses bras comme s’il allait encore lui arriver quelque chose dans la minute.

- Baka...C'est de ma faute...Tu le sais je...Il grimaça un peu de douleur. Il ne me laissera jamais tranquille.

Non c’était faux. Si Yûto n’avait pas fait autant de foin en désobéissant peut-être que Dieu aurait oublié le médium, ou s’il ne s’était pas mis avec lui. Il était sûr que c’était ça qui le faisait enrager, qu’un de ses anges puisse aimer un pauvre humain qu’il souhaitait détruire.

- Je regrette…
- Je sais...Mais je t'aime comme tu es mon ange...Il n'y a rien à regretter...Je mourrais d'envie de te voir, j'avais tellement peur !
- Moi aussi.

Oui maintenant il regrettait d’être un ange, de ne pas être seulement un humain comme lui, de savoir toutes ces choses sur ce que son créateur prévoyait de faire de la Terre et de humains qui l’habitaient. Il lui jura de les venger, et il le pensait vraiment. Le comportement de Dieu et de ses frères commençait à lui taper sur le système et il était bien décidé à les restreindre. Ou au moins les empêcher à faire du mal à son magicien plus qu’ils n’en avaient déjà faits.
Ils se couchèrent l’un contre l’autre et s’endormirent rapidement.


L’infirmière les réveilla, bien mécontente de les trouver les deux dans le même lit, surtout que lui n’était pas autorisé à être là ! Alors après quelques minutes à l’embêter, ils se plièrent à sa volonté et Yûto sortit du lit rapidement, défroissant ses vêtements alors que le médecin entrait. Les examens durèrent bien une éternité et l’un comme l’autre était frustré de savoir que Ren ne pourrait pas faire grand-chose avant deux jours. Mais heureusement, ils purent partir, ce qui en soit était déjà bien. Me cuisinier de l’hôtel vint les chercher et ils arrivèrent à bon port, entiers.

L’ange s’attendait un peu à ce que les élèves soient curieux, mais pas aussi inquiets. Ça lui fit plaisir en même temps qu’il était un peu contrarié. Ils s’attachaient tous les uns les autres mais un jour où l’autre Ezeckiel devrait partir sous peine qu’on découvre sa jeunesse éternelle ! C’est Min-Ho qui leur demanda la raison de leur absence, et après s’être jeté un rapide coup d’œil, le médium répondit. Mais pas comme Yûto le voulait.

- On a eu un malheureux accident de voiture en revenant ici...J'ai déconcentré Yuto ! Il y eut des rires devant ce petit mensonge indispensable. J'ai été blessé donc il m'ont gardé cette nuit.

Il se mordit la lèvre, parce que techniquement Ren n’y était pour rien. Il ne l’avait pas déconcentré du tout et il était fâché que ce soit encore lui qui soit accusé à tort. Mais il ne dit rien, sans savoir que Min-Ho avait vu son regard coupable et contrarié. Quand ils furent tous dispersés, il emmena son petit-ami jusqu’aux escaliers et là insista pour le porter jusqu’en haut. De toute façon pas le choix ! Heureusement le magicien était assez léger et il n’eut aucun mal à le mener en haut et le poser sur le lit.

- Voilà Princesse !

Ne pu-t-il s’empêcher de dire. Mais Ren étant Ren, il protesta contre sa condition immédiatement.

- Je me sens bien, sérieusement ! Je n'ai aucune envie de rester allonger ici toute la journée !!

Et tout de suite il grimaça parce qu’il avait bougé trop vite. Inquiet, l’ange le fit se recoucher d’une main ferme.

- Arrête tes enfantillages. Le médecin a dit du repos alors ce sera du repos.

Le jeune homme alla se changer, trouvant ses vêtements poisseux et revint peu de temps après dans la chambre où le médium faisait encore un peu la tête.

- Ce n'est pas vraiment comme cela que j'espèrais terminer la soirée

L’ange sourit et se retourna avec un air malicieux.

- Quoi, tu ne voulais pas la passer couché dans un lit ? C’est bien comme tu es en ce moment non ?

Bien évidemment Ren commença à bouder, parce qu’on ne pouvait pas dire que Yûto avait tort. Finalement ce dernier monta sur le lit et avança à 4 pattes jusqu’à son petit-ami, le surplombant.

- Ou alors tu pensais à autre chose ?

Murmura-t-il en frôlant ses lèvres des siennes sans les toucher pour autant. Il joua à ce jeu plusieurs fois et finit par s’écarter en souriant, aussi frustré que lui après tout.

- Le déjeuner est bientôt près, je vais te le chercher et surveiller 5 minutes ces diables. Je reviens.

Il descendit rapidement les escaliers et atterrit dans la cuisine où le cuisinier faisait des pizzas de différents goûts par dizaines. L’ange pu en prendre 2 : une aux quatre fromages et une aux fruits de mers. Il alla vérifier que tout allait bien et en remontant les élèves l’interceptèrent.

- Tsukushi, on pourrait venir avec toi ?
- Eh ? Où ?
- Bah voir Manobu-shi, manger avec lui.
- Il est assez fatigué.
- Maiiiis….

Voyant qu’ils s’inquiétaient toujours pour lui, il hocha la tête mais à condition qu’ils attendent 5 minutes et apportent leur nourriture avec assiettes et couverts pour ne rien tâcher. Il cédait presque plus facilement devant eux que devant Ren mais ça le fit sourire.

Et heureusement qu’il avait mis cette distance de 5 minutes car lorsqu’il entra dans la chambre, il trouva le médium endormi. Il posa les pizzas sur le meuble en bois et se pencha sur le lit, souriant légèrement devant son visage paisible. Il hésita à le réveiller mais, comme s’il savait qu’il était revenu, le magicien ouvrit les yeux et lui sourit à son tour.

- C’est l’heure de manger~

Il l’aida à se relever pour s’assoir et posa le plateau avec leurs pizzas et des couverts sur le lit, lorsqu’on frappa 3 petits coups à la porte. Sachant qui c’était il leur dit d’entrer et là…

…ce fut comme si un essaim d’abeilles était entré dans la chambre. Elle se retrouva vite remplie et surtout les conversations fusaient déjà ça et là, les empêchant de parler. Au final quand tout le monde fut installé, Sang-Hoo leva son verre, se mit debout et cria, suivit par les autres :

- A Tsukushi et Manobu, qu’ils se rétablissent vite !

Après s’être changé et aspergé le visage, il taquina pendant quelques instants son amant avant de venir partager avec lui un baiser brûlant qui malheureusement, ne pourrait pas encore aboutir. Et puis Ren le laissa partir chercher à manger parce que mine de rien ils étaient affamés tous les deux. Une fois en bas il choisit deux pizzas à goût différent et, après les suppliques des élèves, leur permit de monter quelques instants pour manger avec eux.

Quand il remonta le médium dormait paisiblement mais à son grand bonheur il se réveilla de lui-même parce que Yûto détestait le faire. Quand il fut bien réveillé, l’ange posa les pizzas sur le lit, heureux de le voir affamé comme ça, signe qu’il allait bien malgré tout.

- Ça va sûrement te manquer quand on va retourner chez nous, je cuisine pas aussi bien.
- Je suis sûr que tu peux en faire des meilleurs.

Fit le plus vieux en lui caressant le bout du nez. Il coupa des parts et regarda le magicien en prendre une avec envie. Et pile au moment où il le pensait, on frappa à la porte.

- Qu'est ce que c'est ?
- Je crois savoir.

Et en effet, une ribambelle d’élèves, garçons et filles se faufilèrent les uns après les autres dans leur chambre, envahissant tout l’espace. Le reste ne fut que rires, plaisanteries en tout genre mais jamais on aborda l’accident ou des trucs gênants. Ils passèrent tous un bon moment ensemble, partageant beaucoup, que ce soit de la nourriture ou des expériences personnelles. Mais quand Yûto se rendit compte que Ren ne parlait plus mais que surtout ses yeux se fermaient tous seuls, il décida de mettre fin à leur « pizza party » comme certains avaient appelé ce moment.

- Allez tout le monde, on va y aller. Rappelez-vous qu’il y a cours cet après-midi quand même et Ren doit se reposer.

Ils hochèrent tous de la tête, emportèrent leurs déchets avec eux et retournèrent dans leurs se décontracter un peu avant de marcher dehors pour le cours sur les dramaturges italiens. Pendant ce temps-là l’ange coucha consciencieusement son petit-ami et l’embrassa légèrement en le couvrant de la couverture.

- Je vais en cours, je reviens dans quelques heures. Repose-toi.

Ce qu’il ne savait pas c’est que, bien au contraire le médium ne se reposerait pas. Mais pour l’instant Ezeckiel réunit ses élèves et tous ensembles ils visitèrent des théâtres anciens, parlèrent des acteurs d’antan, des différences avec ceux de maintenant, tout ça dans la convivialité et sous la chaleur de l’Italie.
Vers 16h ils s’achetèrent tous une glace et s’installèrent sur une des grandes places, la dégustant tout en parlant de tout et de rien. Le professeur pu finir son cours dans les temps, les élèves étant particulièrement attentifs et même si lui ne pensait qu’à son magicien qui était resté à l’hôtel. D’ailleurs il fit un lapsus en plein milieu d’une phrase et dit « Ren » à la place d’un autre nom. Ça fit rire tout le monde et rougir l’ange. Il s’était passé à peine un après-midi et déjà il lui manquait horriblement.

Mais enfin ils rentrèrent tous, les pieds en compote et soufflant de soulagement quand ils retrouvèrent leurs chambres respectives. Yûto entra dans la sienne mais à ce moment-là il entendit geindre à l’intérieur. Aussitôt il ouvrit la porte et vit avec horreur que le médium pleurait, se tordait dans tous les sens, avait déchiré les draps mais que surtout il dormait encore. Donc c’était un cauchemar, ou autre chose ? Il craignait plus que tout une nouvelle prémonition et même s’il était toujours curieux, il se refusait à savoir ce que Ren voyait. Mais là ça avait l’air puissant et surtout mauvais pour eux.

Il se précipita sur le lit et se pencha sur lui, se demandant quoi faire pour le calmer, ses larmes lui transperçant le cœur. Autant parce qu’il avait peur que parce qu’il ressentait chaque émotion du jeune homme. Finalement il ouvrit les yeux et…L’ange ne comprit pas pourquoi en le voyant il redoubla en pleurs. Qu’avait-il fait dans son rêve qui mérite cela ? Etait-ce ci grave ? Yûto se contenta de le prendre dans ses bras et de le bercer en chuchotant des mots rassurants.

- C’est fini, complètement fini. Je suis là, ce n’est rien.

Il avait l’impression de se voir quand il avait ses cauchemars et maintenant il comprit ce que le magicien devait ressentir à ce moment-là, même si ce dernier ne lavait pas frappé comme lui le faisait. C’était horrible de voir celui qu’on aime souffrir mais ne rien pouvoir faire. Enfin presque rien vu que l’ange se servit de sa proximité pour lui envoyer des ondes de chaleur et de calme. Bientôt ça paya et il n’entendit plus que des sanglots, et enfin plus rien. Alors il l’écarta un peu de lui et sécha ses larmes avec ses doigts.
Et même s’il ne voulait pas le savoir, il lui demanda quand même. Parce qu’il voulait le libérer du poids de ses prémonitions. C’était ça qui l’emportait toujours vers le fond, le fait de savoir tous les malheurs qui lui arriveront, qui lui sont arrivés. Et de faire des prémonitions ne lui permettait pas d’être en paix avec lui-même. Mais maintenant que Yûto était là, il était persuadé qu’il arriverait à le soulager ne serait-ce qu’un petit peu. Il détestait tellement quand il était dans cet état ! Avant, vu qu’il était dans les cieux il ne pouvait rien faire quand ça arrivait mais maintenant si. Il pouvait l’aider à son maximum. Dieu ne les battrait pas !

- Parle-moi. Dis-moi ce qu’il s’est passé. Qu’as-tu vu ?

Il ne voulait pas savoir, ça lui faisait trop mal. Il avait trop peur même. Il ne souhaitait pas connaitre son futur, ça ne l’intéressait pas, ce qui arriverait arriverait, que pouvait-il y changer ? Et puis tout n’était pas forcément prédéfini. Pourtant il se sentit obligé de lui demander de lui raconter, pour le soulager d’un poids trop lourd pour lui seul.

- C'est...J'ai vu l'ange qui nous a attaqué je pense...Au Colisée...Il...Il te torturait....Et je ne pouvais pas te sauver...Tu ne me voyais pas...Je ne pouvais pas te toucher...Et...et...Tu... Oh mon dieu Yuto...

Pas besoin d’en dire plus, pour qu’il soit aussi bouleversé il devait être mort non ? Mort dans sa prémonition…C’est pour ça qu’il ne voulait jamais savoir, parce que maintenant il allait remettre tous ses gestes en question. Dois-je faire ça ? Dois-je aller là ? Ou pas ?

- Yuto...Je ne veux pas...Ne va pas au Colisée d'accord ? Ne te lance pas non plus dans quelque chose de dangereux sans moi...D'accord ?

L’ange se mordit les lèvres. Pourquoi ce lieu où lui et ses élèves voulaient tellement aller ??? Ils en parlaient depuis des jours en classe, encore tout à l’heure ils se demandaient à quelle heure ils iraient et comment. A pied ? En métro ? Cependant il se devait de rassurer Ren et même si ça ne lui plaisait pas, il promit.

- D’accord. Je n’irai pas seul.

Ça ne marcha qu’à moitié et il commença vraiment à s’inquiéter quand il lui dit qu’il n’avait pas faim. Ah non, ça il n’était pas d’accord ! Il le força presque à manger et chercha à l’apaiser tout le reste de la soirée. Le médium s’endormit très tôt et à son grand soulagement il ne refit pas de cauchemar.

Le lendemain il retourna en cours, après avoir une nouvelle fois promis de ne pas aller au Colisée et de ne pas rester seul. De toute façon si l’ange les attaquait, que pourraient faire une dizaine d’élèves humains ? Il ne dit rien à Ren mais regretta d’être ainsi limité alors que lui ne ressentait aucune mauvaise impression concernant le monument. La journée fut morne pour lui parce qu’il ressassait toute cette histoire dans sa tête, persuadé qu’il y avait un piège quelque part. Et si avec la prémonition du magicien on les forçait justement à ne pas aller au Colisée et à aller ailleurs pour cette fois, les tuer définitivement ?

C’est toujours avec ces pensées en tête qu’il rentra à 17h à l’hôtel avec les jeunes gens, et dès qu’il entra dans la cuisine il vit le cuisinier raccrocher son portable et paraitre gêné. En fait non, il était gêné que Yûto l’ait vu. Qui l’avait appelé ? En voyant ses yeux qui voguaient vers l’étage, il su de qui il s’agissait et eu un petit rire. Ren avait sûrement embêté le pauvre italien toute la journée pour savoir si oui ou non il était rentré en un seul morceau. Alors il monta et fut heureux que le jeune homme ait retrouvé l’état de ses jambes…et encore plus quand celui-ci commença à le déshabiller prestement à peine ses fesses avaient-elles touchées le lit. L’instant qui suivit fut magique tellement il en avait rêvé depuis des jours et même si ça ne lui suffisait pas, il s’en contenta allégrement.
Le voyant particulièrement de bonne humeur, il lui demanda alors.

- Ne Ren…Laisse-moi aller leur faire visiter. Je leur ai promis d’y aller avec eux. C’est très important, je tiens toujours mes promesses tu le sais.

Mais ça ne suffisait pas pour le convaincre encore, alors il décida d’user de ses charmes pour le faire céder, certain que c’était sans danger. Il y alla à vagues de baisers dans le cou, de moues de hamster et de petites caresses et mots rassurants, ce qui acheva de le faire craquer. Il accepta avec plaisir même de l’emmener. Pour cette fois il était vraiment confiant, rien n’arriverait.

Et le lendemain, au moment de partir il l’était toujours. Les élèves étaient aussi contents que lui que Ren vienne avec eux l’ange insista pour le tenir par le bras pour avancer. Même s’il se débrouillait très bien, il ne voulait pas le voir trébucher ou on ne sait quoi. Avec un soupir le médium accepta et ils marchèrent avec joie vers le bâtiment. Pendant tout le chemin Yûto faisait son possible pour le rassurer, le sentant devenir plus nerveux. Il usa de son pouvoir ainsi que de petits baisers par-ci par-là, ce qui n’empêcha pas que devant le Colisée, le médium se tendit jusqu’au possible, refusant d’entrer à l’intérieur. Comme les élèves ne comprenaient pas, il les fit attendre en groupe dans un coin et prit son petit-ami à part.

- Calme-toi Ren, ce n’est qu’une prémonition. Toi et moi pouvons la changer. Je suis certain à 100% qu’il ne se passera rien entre ces murs de pierre d’accord ? Alors tu vas respirer calmement, prendre ma main et ne jamais la lâcher c’est compris ? Et en sortant, si j’ai eu raison, tu devras…

Il faisait ça plus pour détendre l’atmosphère qu’autre chose et gratifia le magicien d’un sourire mesquin qui en disait long. Ça eu l’effet escompté et Ren le traita de pervers avant de rejoindre les autres, soudainement soulagés que leur professeur soit là. Après avoir payé les entrées, ils se dirigèrent tous à l’intérieur, d’abord au rez-de-chaussée. Il n’y avait pas foule aujourd’hui mais ils ne passaient pas un instant sans croiser quelqu’un. Et pendant que Yûto expliquait certaines choses aux jeunes gens, aussi émerveillés que lui par l’imposant stadium, il scrutait autour de lui à la recherche d’une erreur, d’un ange ou pire…d’un démon. Parce que la description de Ren était claire : l’ange avait les ailes noires. Et les soldats de Dieu n’avaient pas d’ailes noires, que des blanches. Donc ce qu’il avait vu était un démon. Etait-ce un signe pour lui dire de se méfier de l’Enfer ? Si maintenant même le Diable lui en voulait, il ne s’en sortirait pas ! A un moment il caressa du bras la marque à son bras et retira sa main quand le médium le scruta à son tour.

- Au fait Tsukushi, vous vous l’êtes fait où votre tatouage ? Il est vraiment très beau !

La question était innocente en soi, mais ça le perturba énormément. Une nouvelle fois il baissa sa manche de chemise jusqu’à son pouce et n’osa pas les regarder quand il mentit.

- Au Japon, une petite boutique. Vous ne connaissez pas, c’est…un homme qui me l’a fait.

Ou une femme ? Ou personne ? C’était apparu tout seul de toute façon…

Le reste de l’après-midi se passa sans anicroches et autres questions gênantes pour eux. Finalement, vers 17h30, ils sortirent du Colisée, les yeux toujours brillants de toute la splendeur des pierres anciennes et toujours debout. Ils allèrent manger une glace chez un glacier ambulant, dont l’enseigne portait un drôle de nom qui ne fit rire que l’ange vu que c’était un jeu de mot français. Il eu l’air bête et baissa la tête en faisant la moue quand on se moqua de lui.

Finalement, épuisés, ils rentrèrent à l’hôtel, mangèrent des tonnes de pâtes à la bolognaise avec un appétit féroce, faisant rire le cuisinier et chacun alla dans sa chambre pour se reposer. En entrant dans la leur, Yûto se tourna vers Ren et lui sourit en le plaquant contre la porte fermée.

- Tu vois, qui avait raison ? Alors, quelle est ma récompense Monsieur le Magicien ?

Tout se passait bien, ce jusqu’à ce que les élèves lui posent des questions sur son « tatouage ». Il savait que ça arriverait mais espérait être préparé. Il bredouilla un mensonge vite fait, priant pour qu’ils en soient satisfaits.

- Il a hésité à se faire tatouer mon nom, mais ca fait un peu too much.

Yûto éclata de rire à la suite des autres, content de la façon dont il avait stoppé la conversation, et enlevé son malaise. Il ne souhaitait vraiment pas mentir à ses élèves, mais là pas le choix. Ils partirent du Colisée en chahutant tous, se reposèrent un peu avant de reprendre la marche pour rentrer à l’hôtel.

L’ange ? Pervers ? Loin de là, pensons-bien qu’il y a quelques semaines il était encore le « Petit Vierge du Paradis ». Mais tout se contredisait. Il aida Ren à monter les escaliers, très préventif et merveilleusement attentif à lui et pourtant, une fois la porte fermée, il le plaqua sans ménagement contre le bois, un petit sourire aux lèvres en lui disant qu’il avait eu raison.

- C'est vrai, je l'avoue, tu as gagné.
- Alors j’ai droit à une récompense, ne ?

Ezeckiel fondit sur ses lèvres, les dévorant pendant qu’un de ses bras le soutenait contre le mur et que l’autre rapprochait fermement Ren contre lui. Complètement émoustillé par cette échange, il commença à lui mordiller son menton et son cou, remontant vers sa bouche et gémissant déjà de plaisir en le sentant le caresser entre ses jambes, là où ça devenait de plus en plus sensible. Il fut plus que surpris quand soudainement le médium le repoussa, le faisant tituber tellement son envie à ce moment-là était forte. Ça voulait dire quoi ?

- Ta récompense, c'est une place pour le spectacle de magie demain soir. J'ai prévu gros si tu voulais emmener les petits avec toi...Enfin les petits...Tu vois ce que je veux dire, pas vrai ?
- Ren ! T’as pas le droit de faire ça ! Je me vengerai tu verras, et le pire c’est que tu m’en redemanderas encore !

Il fit une moue boudeuse et se coucha sur le lit, la tête dans l’oreiller sans vouloir en sortir. Mais son ventre le rappela à l’ordre et il descendit toujours en faisant la tête, les efforts de Ren pour le dérider faisant rire toute la tablée. Et quand le magicien commença à papoter quelques secondes avec l’élève assis à ses côtés, Yûto eut un petit sourire sadique et fit semblant de ramasser sa serviette, pour à la place caresser subtilement ses cuisses et entre ses jambes, le faisant sursauter. Il afficha un air angélique et continua de manger. Avec ça, il avait fini de bouder, pour l’instant.

Le lendemain tout le monde se prépara avec entrain pour aller voir le médium sur scène. Personne ne pouvait à quel point l’ange était fier de ce que son petit-ami allait accomplir, peut-être aurait-il dû faire plus gaffe que ça. En arrivant dans la grande salle déjà bien remplie, ils furent assis dans la dizaine de premiers rangs et après avoir donné quelques recommandations à ses élèves, le professer s’assit à son tour, soudainement anxieux. Il sentait que quelque chose allait clocher et il surveilla les alentours, ne détectant aucun ange. De toute façon Ren ne faisait que quelques tours de cartes, que pourrait-il faire de dangereux, se couper un doigt ? Ce n’était pas ça qui allait le tuer.

Le mentor n’avait rien de bien impressionnant, à part son regard envoûtant qui…ne l’envoûta pas. Il regarda avec amusement les premiers tours qu’ils faisaient à deux, souriant doucement devant le visage concentré de l’humain. Ensuite il resta seul sur scène et fit un tour de divination dont il ne cru ni le début ni la fin. Par contre il fronça les sourcils quand on apporta un grand bac d’eau et que Ren commença à enlever son haut. Alors aussitôt le mauvais pressentiment se fit plus puissant, ça allait mal se passer, il le savait ! Il le sentait maintenant, l’ange était pas loin. L’ange ou le démon. Il chercha à attirer l’attention de son petit-ami mais celui-ci ne sembla pas comprendre quand il lui fit signe de ne pas descendre dans l’eau. Et 1 minute plus tard, attaché de partout, Ren s’enfonçait dans l’eau.

Yûto avait bien été tenté de monter sur scène et stopper le tour, mais comment expliquer ça au magicien et à toute l’assistance ? Lui-même n’était pas sûr que son pressentiment soit vrai. Et s’il faisait tout foirer pour rien, la carrière du médium en pâtirait. Alors il se contenta de regarder, anxieux, le jeune homme dans l’eau. Des minutes passèrent…trop de minutes passèrent à son goût. On entendit des murmures des habitués et des gens commencèrent à monter sur scène, actionner le levier pour remonter la machine mais rien n’y faisait. Ren commençait à gigoter dans l’eau et alors Ezeckiel le vit. Leur adversaire, caché dans un coin de la salle à lui faire coucou de ses dents blanches.

Yûto se leva alors très vite, bousculant tout le monde et n’écouta pas ses élèves qui l’appelaient. Il commençait à y avoir plus de monde sur scène, des techniciens et le mentor qui faisait pâle figure. Le médium se noyait, le tour était fichu, sa réputation avec.

- Poussez-vous !

Fit-il en arrivant. Il se débarrassa rapidement de sa chemise, s’agrippa aux bords de la bassine et à l’aide de ses muscles se hissa tout en haut, avant de passer une jambe et de plonger dedans. L’eau était devenue glacée, ce qui ne devait pas être le cas au début. Cet ange était très fort. Il s’acharna sur les lanières, essayant de les briser pour libérer son petit-ami qui suffoquait déjà. Il opta pour plusieurs options, le prenant dans ses bras, les pieds contre la vitre et tirant de toutes ses forces pour tout casser mais rien n’y faisait. Tout était bien accroché, et Ren se noyait. Ezeckiel remonta pour prendre de l’air et dirigea son regard vers lui, ne se souciant plus des autres.

- Arrête ça ! Laisse-le tranquille !

Mais son adversaire le regardait avec un grand sourire et il replongea sous l’eau. Alors dans une dernière tentative, il le prit à nouveau dans ses bras et fit monter son pouvoir en lui.

Ça ne lui avait encore jamais fait ça, en 3025 ans d’existence. C’était comme…une onde d’électrochoc qui fit vibrer la surface de l’eau et se répandit sur l’assistance toute entière, englobant l’ange en même temps qui, effrayé par cette vague étrangère, disparut. Une par une, les personnes s’endormirent sur leur siège ou sur la scène à cause du pouvoir de Yûto. Il ne savait même pas comment il avait fait mais ce qui était sûr, c’était qu’il avait réduit à l’état de loque toutes les personnes dans la salle. Il ne sentit plus la présence de l’adversaire et aussitôt les lanières de la machine se détachèrent facilement, libérant Ren inconscient.

Une nouvelle fois il se hissa jusqu’au bord et se fit tomber en premier, le jeune homme atterrissant violemment sur lui. Aussitôt il le retourna sur le dos et s’empressa de lui faire un massage cardiaque et du bouche à bouche, usant de sa dernière énergie de pouvoir pour le réveiller, ou le ramener à la vie.

Et une à une, les personnes se réveillaient.

- Allez Ren, allez !